À portée de main (Mais hors d’atteinte)
Thriller psychologique
En descendant à la cave pour détruire des preuves, Pierre Sarlat, homme d’affaires impitoyable, se retrouve enfermé. Bientôt, un message tombe : « Vire 1,2 million dans les 72 h ou tu ne ressortiras jamais. »
Entre hallucinations, soupçons et paranoïa, il vacille. Et si son propre entourage tirait les ficelles — sa femme ? Un ancien complice ? Mais l’ombre vient d’ailleurs. Un vieil homme, discret, oublié, qui l’observait depuis longtemps... juste à portée de main.
L'Étau
Prologue – Ravel
Le vieux Ravel ne tapait pas : il effleurait le clavier, chaque touche déclenchant une onde dans l'air saturé de silence. Sa lampe de bureau baignait son visage ridé dans une lumière blafarde. Sur l’écran, trois fenêtres ouvertes :
une caméra thermique bricolée, pointée vers la bastide voisine,
les logs du Wi-Fi Sarlat,
un logiciel d’automatisation : son œuvre, son arme.
Un script, discret, attendait patiemment le signal pour déclencher la serrure motorisée du sous-sol. Il l'avait écrit lui-même. Il but une gorgée de tilleul, la main à peine tremblante. Puis observa l’icône du virement bancaire en attente.
« Quand l’arrogance dépasse la prudence… la justice vient parfois d’où on ne l’attend pas. »
Il ferma les yeux. Un sourire presque imperceptible effleura sa bouche.
Chapitre 1 – Pierre
Pierre Sarlat n’était pas un homme aimé. Autoritaire, colérique, avare, il avait construit un empire sur la manipulation et l’intimidation. Mais il s’en moquait. Ce soir-là, il descendit à la cave, un dossier sous le bras. Il voulait brûler des preuves : contrats fictifs, virements douteux, relevés illégaux.
Il ouvrit le vieux fût métallique, craqua une allumette et y jeta les documents. La flamme monta, orange et tremblante. Un courant d’air. Un claquement sec.
Il sursauta. Se retourna. La porte s’était refermée derrière lui.
— Merde…
Il tira la poignée. Rien. Frappe. Rien. Silence. Son téléphone vibra.
“Tu sais pourquoi tu es là. Vire 1,2 million sur ce compte sous 72 h, ou tu ne ressortiras jamais.”
Chapitre 2 – Ravel
Ravel appuya sur « exécuter ». Une ligne de code s’enclencha, fermant le verrou motorisé qu’il avait détecté des mois plus tôt dans les plans de rénovation.
Il n’avait rien contre Pierre personnellement. Mais il méprisait ce qu’il incarnait : l’impunité.
Chapitre 3 – Pierre
Pierre resta figé, incrédule. Au début, il pensa à une simple intimidation. Une manière de lui faire peur, un avertissement codé. Ce n’était pas la première fois qu’on essayait de lui rappeler qu’il n’était pas invincible. Mais jamais de façon aussi… maîtrisée.
Les heures passèrent. Puis de nouveaux messages, toujours du même numéro :
“Tu as eu ta chance. Il te reste 56 heures.”
Le réseau mobile était faible. Pourtant, le Wi-Fi semblait actif, comme si quelqu’un s’était assuré qu’il reste connecté… uniquement à cette ligne de communication.
Il pensa à Milan. À Julia. À son frère.
Mais surtout… à Élise.
« Elle était là. Elle sait tout. Elle me hait, peut-être… »
Chapitre 4 – Ravel
Ravel regardait l’écran. Pierre allait céder. La soif ferait le travail.
Élise n'était au courant de rien. Mais elle avait semé l’idée, un soir d'été, sur ce banc du jardin :
« Pierre a plus d’un million planqué. Même moi je ne sais pas où. »
Ravel n’avait rien oublié. Pas même son besoin d’argent. Ni les soins coûteux de sa défunte épouse.
Chapitre 5 – Pierre
Le troisième jour, Pierre était vidé. Sa langue collait à son palais. Il hallucinait.
Il revoyait Élise, vêtue de blanc, ricaner. Milan qui l’applaudissait. Le visage mort de son père.
— Vous m’avez eu… bande de rats… Vous voulez du fric ? Tenez.
Il saisit son téléphone, les doigts tremblants, les yeux flous. Et envoya les 1,2 million d’euros.
Puis il s’écroula, délirant et vidé.
Chapitre 6 – Élise (vue par Pierre)
Elle le découvrit effondré dans l’entrée. Elle le lava. Nourrit. Appela un médecin. Aucune question.
Mais lui, la fixait. Méfiant.
— T’étais à Aix ? Vraiment ? Moi, j’étais à dix mètres de là. Trois jours. Sans eau.
Élise (calme) : — Tu crois que j’ai fait ça ?
Pierre (amer) : — Quelqu’un a su pour l’argent. Et toi… tu as une idée ?
Élise (tranchante) : — T’as fait souffrir trop de monde, Pierre. Tu veux faire la liste ? Ou ça prendrait trop de pages ?
Chapitre 7 – Ravel
Ravel observait le jardin. Élise était revenue. Pierre l’avait confrontée.
Il n’y aurait pas de vengeance spectaculaire. Il n’en voulait pas. Ce qu’il cherchait, c’était le déséquilibre corrigé. Et maintenant, il l’était.
Chapitre 8 – Pierre
Il ne dormait plus. Il errait dans les couloirs. Des regards échappés, des silences trop lisses. Il revoyait la cave. L’humidité. La peur.
Un soir, il passa à l’acte.
Chapitre 9 – Le Message
Le sang. Les draps froissés. Le souffle court. La violence avait éclaté. Brutale. Défoulée.
Mais à peine avait-il repris ses esprits qu’un bip sec déchira le silence. Son téléphone. Un nouveau message.
« Tu n’as jamais été seul. Le séminaire d’Élise était réel. Elle t’aimait, malgré tout. L’argent ? Tu sais très bien d’où il vient. Moi aussi. Tu voulais la vérité ? Maintenant, vis avec. »
D’autres lignes s’enchaînaient. Des dates. Des noms. Des souvenirs. Des vérités que seul un dieu numérique pouvait connaître.
« Ce n’est pas terminé. »
Chapitre 10 – Fuite
Il referma violemment le téléphone, chercha son passeport, un sac, une arme. Il fallait partir. Fuir la bastide. Le pays. Lui-même.
Il monta dans sa voiture, en pleine nuit. Pris une petite route. Puis une autre. Mais derrière lui… quelque chose clochait. Le GPS déraillait, les itinéraires tournaient en boucle.
— Non… C’est pas possible…
À l’aube, au fond d’un vieux motel sans nom, il tenta de se reconnecter à un réseau.
Le téléphone vibra à nouveau.
« Tu peux courir, Pierre. C’est ce que tu sais faire. Mais même ça, tu ne le fais plus très bien. »
Chapitre Final – Ravel
Ravel arrosait ses plants de tomates, un vieux chapeau sur le crâne.
Sous la maison, dans la cave, un terminal clignotait doucement. Un seul mot s’affichait, en boucle :
« En cours. »
Il éteignit la machine. Rangea ses outils.
Puis regarda le ciel, tranquille.
Derniers murmures
On ne sait pas ce qu’il est advenu de Pierre. Ni ce qu’il a vraiment fait cette nuit-là. Ni jusqu’où la main de Ravel s’étend.
Mais une chose est sûre : Pierre ne redeviendra jamais libre. Même s’il croit encore que tout cela… …était à portée de main.
Dans la bastide, les voisins murmurent encore. Que la cave semblait étrange. Trop vaste. Trop silencieuse. Qu’on y entendait parfois des sons métalliques, discrets, comme un écho d’ailleurs. Et qu’un inconnu — silhouette voûtée, mains gantées — venait parfois y déposer des colis… Toujours entre chien et loup. Toujours sans explication.
Certains affirment que Ravel n’a jamais existé. Qu’il n’était qu’une interface. Un nom de code activé au bon moment. Un fantôme numérique programmé pour faire payer ceux que la justice avait oubliés.
D’autres jurent qu’ils ont vu Élise, bien vivante, à la sortie d’un aéroport au nom effacé. Qu’elle aurait tout orchestré. Que le cadavre retrouvé dans la chambre n’était pas le sien. Mais alors… pourquoi n'y eut-il jamais d'autopsie officielle ? Pourquoi tant de zones d’ombre… dans une affaire aussi médiatique ?
Des traces ADN manquantes. Un certificat signé par un médecin aujourd’hui introuvable. Et un téléphone, réactivé brièvement… trois semaines plus tard.
Antoine le 7 Juillet 2025
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