L’affaire Rambla, la malédiction du pull-over rouge de Aurelie Joly, Frederic David

Quand la quête de vérité se heurte aux dérives d’un mythe

Dans La Malédiction du pull-over rouge : L’affaire Rambla, Aurélie Joly et Frédéric David reviennent sur l’un des épisodes judiciaires les plus emblématiques – et controversés – de la Ve République : l’affaire Christian Ranucci. Mais leur ouvrage va plus loin qu’un simple rappel historique. Il démonte méthodiquement l’un des piliers du doute autour de cette affaire : le célèbre livre de Gilles Perrault, Le Pull-over rouge, publié en 1978.

Aurélie Joly et Frédéric David livrent une contre-enquête rigoureuse, et osent poser une question longtemps jugée taboue : et si Le Pull-over rouge avait sciemment égaré le lecteur, au service d’une cause – l’abolition de la peine de mort – certes noble, mais aux conséquences judiciaires et humaines profondes ?

Gilles Perrault : romancier ou enquêteur ?

Le livre de Gilles Perrault, en donnant à voir un Christian Ranucci innocent et broyé par la machine judiciaire, a profondément marqué les esprits. Il a contribué à faire basculer l’opinion publique contre la peine capitale. Mais derrière son apparente rigueur documentaire, plusieurs éléments sont aujourd’hui contestés : interprétations biaisées, omissions de pièces à charge, extrapolations non vérifiées…

Joly et David montrent notamment comment Perrault construit un « récit parallèle », où le fameux pull-over rouge retrouvé dans une champignonnière devient la clef de voûte d’une théorie alternative, sans que jamais ce vêtement ne soit formellement lié à un autre suspect. Dans sa volonté de défendre Ranucci, Perrault occulte ou minimise certains faits troublants : les aveux détaillés de Ranucci, la présence de sang sur ses vêtements, ou encore les résultats de l’enquête de terrain.

Une falsification par omission ?

Le reproche principal adressé à Gilles Perrault par les auteurs de La Malédiction du pull-over rouge est moins le mensonge direct que la manipulation par omission. Perrault, romancier et militant, sélectionne les éléments qui servent son propos, tout en écartant ceux qui pourraient nuancer ou contredire son hypothèse. Cette posture, bien que sincèrement engagée, aurait entretenu un doute devenu quasiment mythique, parfois au mépris de la vérité judiciaire.

Victimes oubliées

Le livre de Joly et David redonne aussi la parole à ceux que Le Pull-over rouge a éclipsés : la famille Rambla, et notamment Jean-Baptiste, petit frère de la victime, profondément marqué par la médiatisation de l’affaire et la réhabilitation partielle de Ranucci. Lui-même devenu criminel des décennies plus tard, Jean-Baptiste Rambla reste le témoin silencieux d’un engrenage tragique mêlant traumatisme personnel et instrumentalisation médiatique.

Une justice au prisme de l’idéologie

La Malédiction du pull-over rouge invite donc à une lecture plus critique de l’histoire. Elle rappelle qu’une bonne cause ne justifie pas la manipulation des faits, et qu’un récit militant, même brillant, peut engendrer des effets pervers en brouillant la frontière entre vérité judiciaire et narration romanesque.


L’affaire Rambla, la malédiction du pull-over rouge

Commentaires