Le Mary Celeste est sans doute l'un des plus célèbres navires fantômes de l'histoire maritime. Cette goélette américaine, construite en 1861 sous le nom de Amazon, change de nom pour devenir le Mary Celeste en 1869 après une série de mésaventures qui lui ont donné une réputation de navire maudit. Mais c’est en 1872 que le mystère entourant le navire atteint son paroxysme.
Le 7 novembre 1872, le Mary Celeste quitte le port de New York en direction de Gênes, en Italie. À bord se trouvent le capitaine Benjamin Briggs, un marin expérimenté, sa femme Sarah, leur fille de deux ans, Sophia, et sept membres d'équipage. Le navire transporte une cargaison de 1701 barils d'alcool industriel. Tout semble normal, et rien ne laisse présager ce qui allait suivre.
Le 5 décembre 1872, le brigantin britannique Dei Gratia, commandé par le capitaine David Morehouse, aperçoit le Mary Celeste à la dérive, à environ 600 miles à l'ouest du Portugal. Le navire semble intact, toutes ses voiles sont partiellement déployées, mais il ne répond à aucun signal. Intrigué, Morehouse envoie un petit groupe d'hommes pour monter à bord du Mary Celeste.
Ce qu'ils découvrent à bord est à la fois fascinant et terrifiant. Le navire est désert, mais il n'y a aucun signe de lutte ou de violence. La cabine du capitaine contient encore ses effets personnels, et la nourriture sur la table semble à peine entamée. Les réserves d'eau et de nourriture sont suffisantes pour plusieurs mois, et les objets de valeur, dont les biens personnels de l'équipage, sont intacts. Cependant, l'unique canot de sauvetage est manquant, tout comme les papiers de bord officiels, à l'exception du journal de bord du capitaine, dont la dernière entrée date du 25 novembre, bien avant la découverte du navire.
Le mystère s'épaissit lorsque l'on constate que la cargaison est presque entièrement intacte, bien que neuf barils aient été retrouvés vides. L'état du navire laisse penser qu'il a été abandonné précipitamment, mais pourquoi ? Aucun des membres d'équipage ou de la famille Briggs n'a jamais été retrouvé, et aucune théorie ne semble pouvoir expliquer de manière satisfaisante ce qui les a poussés à quitter le navire en plein océan.
Au fil des décennies, de nombreuses hypothèses ont été avancées : une mutinerie, une attaque de pirates, une explosion due aux vapeurs d'alcool, une tempête violente, ou même un phénomène surnaturel. Mais aucune de ces théories n'a pu être prouvée, et le mystère du Mary Celeste demeure irrésolu à ce jour.
Le Mary Celeste, récupéré par le Dei Gratia, est ramené à Gibraltar où une enquête est ouverte, mais elle n'apporte aucune réponse concluante.
En novembre 1884, le capitaine Gilman C. Parker organise une escroquerie avec un groupe d’armateurs de Boston qui chargent la Mary Celeste d'une cargaison sans valeur, mais indiquent sur le manifeste d'expédition qu'il s'agit de biens précieux et l’assurent pour 30 000 livres. Le Mary Celeste finit par s'échouer de façon délibérée en 1885, au large d'Haïti, dans une tentative d'escroquerie à l'assurance.
Le premier procès concerne la fraude. Toutefois, le 15 août, le jury annonce ne pas avoir réussi à atteindre un verdict unanime. Certains jurés auraient refusé de compromettre la défense de Parker dans le procès de baraterie * à venir, où il risquait une condamnation à mort. Afin d'éviter un second procès coûteux, le juge parvient à un accord : les accusés renoncent à leurs demandes de dédommagement et restituent les sommes perçues. Quant au procès pour baraterie, il est reporté, permettant ainsi la libération de Parker.
Malgré cette issue judiciaire, la réputation de Parker est irrémédiablement ternie. Il sombre dans la pauvreté et décède trois mois plus tard. Parmi ses coaccusés, l'un perd la raison, tandis qu'un autre met fin à ses jours. L'écrivain Begg souligne cette ironie du sort en déclarant que, même si la justice humaine n'avait pas puni ces hommes, une malédiction semblait s'être abattue sur eux, remontant à la mort tragique du premier capitaine du navire, Robert McLellan, lors de son voyage inaugural.
Le Mary Celeste disparaît, laissant derrière lui une légende qui continue de hanter les mers et d'alimenter les imaginations les plus fertiles.
Ainsi, l'histoire du Mary Celeste demeure l'un des plus grands mystères maritimes, une énigme flottante dont les échos résonnent encore aujourd'hui dans les récits d'aventure et les mythes des océans.
* Lorsqu'on fait volontairement naufrager un navire..
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300 ans de Gibraltar britannique : 1704-2004 - Peter Bond |
Les textes présentés sur ce blog sont une introduction générale visant à éveiller la curiosité des lecteurs sur des sujets passionnants.
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